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Le cinéma est né court : une histoire de contraintes, d’invention et de narration

  • Photo du rédacteur: Sanjorge Guillaume
    Sanjorge Guillaume
  • 24 août
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 3 jours

Lorsque l’on évoque le cinéma, l’imaginaire collectif se tourne spontanément vers le long-métrage projeté sur grand écran. Pourtant, les origines du cinéma racontent une tout autre histoire. Le cinéma est d’abord né du format court, façonné par des contraintes techniques qui ont paradoxalement ouvert un immense champ de création. Cette réalité fondatrice invite à reconsidérer notre manière d’aborder les formes cinématographiques, anciennes comme contemporaines, et à replacer le format court au cœur de l’histoire du cinéma.


Les frères Lumière : inventeurs du cinéma et du récit bref


En 1895, Louis et Auguste Lumière présentent au public leur cinématographe. Parmi les films projetés figure La Sortie de l’usine Lumière, d’une durée de 46 secondes. Cette brièveté ne relève pas d’un choix esthétique, mais d’une contrainte technique : la longueur limitée de la pellicule. Pour autant, cette contrainte n’entrave en rien la fécondité artistique. Entre 1895 et 1905, les frères Lumière réalisent plus de 1 400 films référencés, auxquels s’ajoutent plusieurs centaines d’œuvres hors catalogue. Presque tous respectent les mêmes règles : une durée inférieure à une minute, une seule prise, un cadre fixe.


Ces films capturent pourtant des scènes universelles et intemporelles : la vie quotidienne, le travail, les loisirs, les mouvements de foule. Ces instants, simples en apparence, provoquent l’émerveillement du public et posent les bases d’un langage cinématographique nouveau. Le format court n’est donc pas un sous-format du cinéma, mais bien son point de départ.


Une expérience internationale dès les origines


Très tôt, les frères Lumière forment des opérateurs chargés de voyager à travers le monde pour filmer des scènes locales. Le cinéma devient ainsi, dès ses débuts, un art international, traversant les cultures, les territoires et les modes de vie. Cette circulation des images participe à la construction d’un regard mondial sur le réel, faisant du cinéma un langage universel, capable de relier les peuples par le mouvement et le récit visuel.


La contrainte comme moteur de création


L’histoire du cinéma montre que la contrainte est souvent un moteur artistique. L’exemple du film Lumière & Company, réalisé en 1995 pour célébrer le centenaire du cinéma, en est une illustration frappante. Une quarantaine de cinéastes internationaux, parmi lesquels Wim Wenders et David Lynch, acceptent de tourner un film en respectant les règles imposées aux frères Lumière : une durée maximale de 52 secondes, trois prises au plus, aucune lumière artificielle. Le résultat démontre que, malgré des contraintes strictes, chaque œuvre porte la signature singulière de son auteur. Le format court ne limite pas la création ; il la stimule, obligeant à une précision du regard et de l’intention.


La narration sérielle, une tradition ancienne


L’idée de raconter une histoire par fragments n’est pas nouvelle. Dès le début du XXe siècle, le cinéma adopte la forme du feuilleton. En 1908, Nick Carter, le roi des détectives inaugure une narration en épisodes. Quelques années plus tard, Louis Feuillade marque durablement l’histoire du cinéma avec Les Vampires, une œuvre sérielle aux personnages récurrents et à l’intrigue construite dans la durée.

Cette écriture fragmentée démontre que le cinéma n’a jamais été limité à une seule forme. Il a toujours exploré différents rythmes narratifs, du film très court au récit étendu sur plusieurs épisodes.


Du train qui entre en gare aux écrans d’aujourd’hui


Avec L’Arrivée d’un train en gare de La Ciotat, les frères Lumière inventent bien plus qu’une image en mouvement. Ils inaugurent une expérience collective, une émotion partagée, un rapport inédit au réel. Depuis, le cinéma n’a cessé de se transformer, d’évoluer avec les supports et les usages, tout en conservant cette même capacité à saisir le temps, le mouvement et l’émotion.


Le format court n’est donc ni une mode ni une rupture. Il est un retour aux sources, une continuité historique qui rappelle que le cinéma peut être puissant, inventif et profondément artistique, même, et parfois surtout, lorsqu’il se déploie dans un temps réduit.


Article rédigé par Maëlle Billant

 
 
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