Quand Méliès rencontre l’intelligence artificielle
- Sanjorge Guillaume

- 9 août
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 3 jours
Dans un article intitulé « Quand l’IA envahit le 7e art », publié dans Le Point le 10 août 2025, Philippe Guedj souligne l’impact croissant des outils d’intelligence artificielle générative dans le cinéma contemporain. Des technologies comme ChatGPT, DALL·E, Sora ou Veo 3 permettent désormais de concevoir des séquences d’effets spéciaux à des coûts largement inférieurs aux méthodes traditionnelles. Là où plusieurs mois de travail mobilisant infographistes, techniciens et équipes spécialisées étaient nécessaires, quelques jours suffisent aujourd’hui pour produire des scènes autrefois réservées aux grandes productions.
Cette évolution technologique s’inscrit pourtant dans une histoire plus ancienne. Bien avant l’ère numérique, Georges Méliès avait déjà ouvert la voie à ces innovations en inventant les premiers effets spéciaux du cinéma. À la fin du XIXe siècle, il révolutionne l’image animée par des trucages artisanaux audacieux : apparitions et disparitions, transformations, décors irréels et créatures fantastiques. Sa démarche repose sur une volonté claire : dépasser les limites du réel, stimuler l’imaginaire et faire du cinéma un art du merveilleux.
Si les outils ont changé, l’intention demeure. À travers les siècles, une même quête traverse l’histoire du cinéma : émerveiller le spectateur par la maîtrise de la technique au service de la narration.
Cette continuité a été récemment soulignée par l’acteur français Christian Clavier. Interviewé par le média Brut en avril 2025 à propos d’un film intégrant des séquences générées par intelligence artificielle, il répond aux inquiétudes exprimées dans le milieu du cinéma par une mise en perspective historique. « Les gens sont toujours étonnés par l’intelligence artificielle. Mais quand le cinéma est né, on était déjà dans de la magie », rappelle-t-il, évoquant les trucages des origines et les illusions visuelles qui accompagnaient déjà la naissance du septième art.
Son propos établit un lien direct entre les expérimentations de Méliès et les usages contemporains de l’intelligence artificielle. Le cinéma s’est construit dès ses débuts sur l’innovation technique et la fascination qu’elle suscite.
Aujourd’hui, ces technologies ouvrent de nouvelles perspectives, notamment pour les productions indépendantes. L’intelligence artificielle permet de concevoir des décors numériques, des environnements fantastiques ou des effets visuels ambitieux sans disposer des moyens colossaux des grands studios. Elle contribue ainsi à rééquilibrer les conditions de production et à redonner une place centrale à l’inventivité et à l’audace artistique.
À l’image des trucages de Méliès en leur temps, l’intelligence artificielle n’est pas une rupture radicale, mais une nouvelle étape dans une histoire continue, où la technique, loin d’éclipser l’art, nourrit le pouvoir de fascination du cinéma.